Commémoration du génocide des Arméniens

24 avril 2008

Les manœuvres diplomatiques évoquées dans mon billet précédent ne doivent pas occulter que ce 24 avril 2008 marque le 93e anniversaire du génocide des Arméniens de 1915. Perpétré d'avril 1915 à juillet 1916, ce premier génocide du XXe siècle à coûté la vie à un million deux cent mille Arméniens d'Anatolie. Aujourd'hui encore, malgré les faits établis, la Turquie nie l'existence du génocide arménien et qualifie les événements de « prétendu génocide » ou de massacres.

Reconnu officiellement par l'Uruguay (en 1965 déjà), la Chambre des représentants de Chypre, 40 Etats des Etats-Unis, la Douma russe, le Parlement grec, le Sénat de Belgique, le Parlement de Suède, le Parlement libanais, le Vatican, L'Italie, le Parlement français, le Conseil national suisse (contre l'avis du Conseil fédéral), l'Argentine, les Pays-Bas, la Slovaquie, le Canada, et la Pologne, le génocide des Arméniens est également reconnu comme tel par certaines institutions internationales et supranationales : la sous-commission de l'ONU pour la prévention des droits de l'homme et la protection des minorités, le Parlement européen et le Conseil de l'Europe.


La déportation comme moyen
Le présent rappel des faits est extrait d'un article de la politologue et spécialiste de l'Arménie Laurence Ritter, paru dans l'édition du 24.04.2005 de Caucaz.com à l'occasion des 90 ans du génocide.
Le 24 avril 1915, plus de 600 intellectuels, médecins et prêtres sont arrêtés et déportés. Les hommes enrôlés dans l’armée ottomane sont désarmés et employés à des travaux de terrassement et progressivement éliminés.

Lorsque Talaat Pacha envoie dans les provinces les ordres de déportation de la totalité de Arméniens de l’Empire - y compris ceux situés très loin du front - il ne reste plus guère qu’à expulser des femmes, des enfants et des vieillards.

Les dépêches des ambassadeurs, comme l’Américain Morgenthau et le consul Leslie Davies - ce dernier étant en poste au coeur de routes de la mort à Kharput - font état des massacres de ces colonnes de déportés, affamés et en guenilles.

La déportation sert en fait à éliminer progressivement l’ensemble des Arméniens. Le point fictif de la déportation est le désert syrien. Et ceux qui y parviennent meurent dans des camps de fortune par centaines, ou sont massacrés sur place.

Les gouvernements des pays opposés à l’Allemagne font parvenir un texte de condamnation à la Sublime Porte, parlant pour la première fois dans l’histoire de « crimes contre l’humanité ». Un jeune Allemand, Armin T.Wegner, en dépit de l’alliance entre Turquie et Allemagne, photographie sans relâche cette extermination.

Les protestations ne servent à rien. Déportations et massacres continuent. A la fin du premier conflit mondial, il ne reste que quelques dizaines de milliers d’Arméniens en Turquie, à Istanbul notamment, contre un peu plus de deux millions en 1914.

Après la chute de l’Empire, les responsables des actes seront jugés, mais les sentences, notamment concernant Tallat Pacha et les deux autres membres du triumvirat organisateurs du génocide, sont peu appliquées et souvent prononcées par contumace. Les territoires arméniens sont complètement vidés de leur population chrétienne – Assyro-chaldéens, Syriaques et Kurdes Yésidis (non musulmans) ayant subi le plus souvent le même sort, bien que non visés directement par la déportation.

L’organisation des massacres par l’Organisation spéciale, les gendarmes turcs encadrant les convois dans des « sites abattoirs », mais aussi les tribus kurdes, ajoutés à la faim et la maladie, ont détruit les deux tiers du peuple arménien.

La reconquête du pouvoir par Kémal fait annuler le traité de Sèvres de 1920 qui prévoyait un foyer arménien sur ces territoires historiques. La France, qui avait mandat sur la Cilicie au début des années 1920, se retire, entraînant un nouvel exode et de nouveaux massacres des populations arméniennes qui avaient tenté de s’y réinstaller.

Dès lors, les Arméniens forment une diaspora. Quelque 300.000 survivants, entraînés par les Russes dans la retraite, ont trouvé refuge dans la petite république arménienne du Caucase rapidement soviétisée. Plusieurs centaines de milliers d’autres sont dispersés entre Grèce et Moyen-Orient, dans des camps de fortune, et beaucoup vont s’embarquer après-guerre, depuis le Levant sous mandat français, vers la France, mais aussi les Etats-Unis et l’Amérique du sud.

Après l’arrivée au pouvoir de Kémal, les Arméniens d’Istanbul, épargnés par la déportation après le 24 avril, et tous ceux qui avaient trouvé refuge dans la ville occupée par les Alliés, quittent à leur tour la Turquie.

La diaspora est aujourd’hui forte de quatre à cinq millions de personnes. Elle s’étend aux quatre coins de la planète, et l’Arménie compte entre 2,5 et 3 millions de personnes. L’importante communauté du Liban s’est vidée avec la guerre civile. Les plus grandes communautés sont aujourd’hui celles de Los Angeles, de Moscou et de France, où elle représente environ 350.000 à 400.000 personnes.
Avant de conclure ce devoir de mémoire, en musique, avec Charles Aznavour, et des images tournées au mémorial du génocide arménien à Etchmiadzin, à une vingtaine de kilomètres d'Erevan, je ne peux que vous encourager à aller lire l'excellent billet, ainsi que les commentaires qui l'accompagnent, publié en octobre 2007 par l'historien Lyonel Kaufmann sur son blog politis.ch. Il vous livre là tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le génocide des Arméniens et le débat qui l'entoure.


envoyé par albertfan

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