Pour sourire : passation de commandance

31 mars 2008

Celles ou ceux qui connaissent mon penchant à analyser parfois de manière grinçante le discours militaire ne seront pas étonnés. Je n'ai pu résister au plaisir de reproduire in extenso le contenu d'un billet publié ce lundi 31 mars 2008 sur le blog Secret Défense de Jean-Dominique Merchet - journaliste à Libération - et intitulé Pour sourire : «Vous reconnaîtrez désormais comme manager l'attaché principal d'administration…»

D.Q.S. ? (De Quoi S'agit-il ?) Pour faire bref, l'Armée française, à l'instar de maintes autres, vit actuellement une phase de restructuration. Il est prévu de revoir à la baisse à partir de l'été 2008 le nombre des emplacements militaires répartis sur le territoire français. Rompant ainsi avec la tradition des garnisons de proximité, la France entend passer de plusieurs centaines d'implantations militaires à quelque 87 ou 90 pôles (selon les sources) baptisés «Bases de Défense» (BdD).

Abandon de garnisons, dissolution de régiments, l'inquiétude gagne les milieux militaires. Je dirais même que cela chahute un peu au dernier rang où les plus effrontés se refilent sous le manteau le texte que voici.


27 juin 2018, manifestation de passation de management de la base de sécurité et défense de X...

Le commentateur : Mesdames, Messieurs,

La manifestation à laquelle vous allez assister est organisée à l'occasion de la passation de commandance de la base de sécurité et défense de X... Elle est placée sous le haut patronage de M. le Haut manager à la défense, près le ministère de la sécurité. Sur les rangs, de l'extrême gauche vers la gauche, vous reconnaîtrez : l'agence de management de la base, la task-force de l'out-sourcing, la cellule de benchmarking, le bureau des ingénieurs civils pilotes de drones et robots, le bureau des commandos de la guerre virtuelle, le bureau des experts de systèmes de systèmes, le bureau du contrôle de gestion, les délégations syndicales, la société de transports contractualisés, l'entreprise de maintenance externalisée, le comité local de vigilance contre la résurgence du militarisme, les pompiers de la municipalité, une délégation de la gendarmolice, une délégation de consultants.

Par devoir de mémoire et respect humanitaire, une délégation de l'association des anciens militaires et de drapeaux des anciens régiments et bases aériennes dissous a été conviée. Elle est placée à l'extrême droite du dispositif.

La manifestation commencera par une allocution du délégué à la défense de la préfecture régionale, qui prononcera la formule de passation de commandance : «Vous reconnaîtrez désormais pour manager l'attaché principal d'administration Jean Civil, ici présent, et vous vous concerterez sur tout ce qu'il vous proposera, pour le bien du service, l'observation des lois, le respect de la réglementation et la garantie de la sécurité de la France».

Il est rappelé que :

- par solidarité avec les personnes à mobilité réduite, il est recommandé de ne pas se lever pendant que le DJ fera jouer le MP3 de l'hymne national «La Lilloise» ;

- lorsque que le délégué criera «Et par le ministre», vous êtes invités à répondre, avec les collaborateurs de la base, «vive la sécurité.

Cette première partie de la manifestation sera suivie d'une marche éco-citoyenne de proximité et de solidarité républicaines, organisée selon le rituel officiel établi par M. Découfflé, président du comité de démilitarisation des manifestations de la défense. Le DJ diffusera la version remixée de l'hymne de la défense «Civils et volontaires». Vous êtes bien entendu invités à chanter en profitant de l'écran géant de karaoké placé en fond de tableau.

Enfin, un buffet payant vous sera servi par la société Sodexho. Une partie des bénéfices sera versée à l'Association de secours aux anciens militaires devenus SDF (ASAM-DSDF), l'autre partie étant au profit des associations Greenpeace, DAL et ATTAC.

«Bon, maintenant que tout le monde a bien ri… vous, là… oui, oui… vous qui faites comme celui qui ne trouve pas le bouton Share This, vous me ferez cent billets sur les vertus du futur modèle d'armée. Ça vous apprendra à disséminer des horreurs sur l'armée de demain.»


Hyperliens
Secret Défense (blog) | Jean-Dominique Merchet

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Le «Petit Livre rouge» de Mao Tsé-toung

29 mars 2008

Lors de ma semaine d'état-major au début mars 2008, je suis tombé au cours d'une de mes revues de presse sur une lettre de lecteur parue dans le quotidien valaisan LeNouvelliste. L'auteure de la lettre [je n'ai malheureusement pas retenu son nom et je m'en excuse] y relevait la fulgurance de l'analyse du philosophe et écrivain Jean Romain dans un billet paru dans le même Nouvelliste, le 5 mars 2008, et intitulé «Le Petit Livre rouge». Entre-temps, j'ai failli oublier de rédiger ce billet qui avait pris forme «sous les drapeaux».


Partant du constat qu'aujourd'hui «on ne parle plus que de la Chine, [le] pays au taux de croissance époustouflant, le pays des JO, le pays de l'avenir pour les investisseurs», Jean Romain s'attache à considérer la place qu'est en droit d'occuper dans une bibliothèque le fameux Petit Livre rouge de Mao Tsé-toung*.

Il fut la Bible de bien des gens durant les années 1960. Même chez nous, en Mai 68, nos fringants étudiants maoïstes et futurs tabellions se donnèrent dans l'extase le frisson révolutionnaire.
Pour Jean Romain, à tout choisir, entre le rayon des documents historiques, celui des monuments et celui des livres qui sont au fondement d'une institution, le Petit Livre rouge de Mao Tsé-toung se range sous «Documents». Les sinologues approuveront certainement cette classification. En regard des classiques chinois ainsi que du rapport au temps et du pragmatisme qui caractérisent la civilisation chinoise, le Petit Livre rouge, c'est tout au plus un succès de librairie.


Pragmatisme chinois

Jean Romain, nous dit aussi que la Chine moderne est aux antipodes de la pensée de Mao Tsé-toung et que, faisant preuve de pragmatisme, elle se développe.

[La Chine] a compris que si l'on veut nourrir les gens et leur donner de quoi vivre dignement, il faut renoncer à l'idéologie, à la planification étatique, redistribuer les terres, et surtout laisser l'économie de marché prendre le pas sur la dictature du prolétariat.
Au gré du balancier historique qui la fait osciller en allers et retours plus ou moins prononcés entre la doctrine confucéenne et les préceptes taoïstes/légistes, la Chine se développe. Plutôt, elle change, à son rythme et dans les limites que lui accorde son passé multimillénaire. Elle nous paraît même adopter les principes de l'économie de marché, ce qui devrait - de notre point de vue d'Occidentaux - l'entraîner obligatoirement sur la voie de la démocratie. Cela nous rassure, plus sur nous-même et notre vision du monde, que pour tout autre chose. Chez certains commentateurs politiques ou économiques, on décèle toutefois la crainte que la Chine réussisse à intégrer les principes de l'économie de marché, sans verser dans la démocratie. Voilà qui bousculerait maintes certitudes érigées en lois.

Si on prend le temps de lire attentivement Le Tao du Prince du philosophe chinois Han Fei (IIIe siècle avant notre ère), dans sa version présentée et traduite du chinois par Jean Levi, adopter les principes de l'économie de marché sans intégrer ceux de la démocratie n'apparaît pas comme une chose impossible pour la Chine. À l'inverse du Petit Livre rouge de Mao Tsé-toung, l'oeuvre de Han Fei trouve sa place, elle, à côté de nos plus grands textes fondateurs tels que la République de Platon, le Léviathan de Hobbes, Le Prince de Machiavel ou Le Contrat social de Rousseau. En véritable doctrinaire du légisme, Han Fei pousse la logique du système jusqu'à ses ultimes conséquences, pour aboutir finalement au mêmes conclusions que la théorie libérale. Le contrôle de la société au travers d'un système implacable d'«incitations» et de «sanctions» n'est pas sans rappeler, sur le principe, le fonctionnement du libéralisme, une autorégulation sociale obtenue par le libre jeu de l'offre et de la demande. Lorsque dans ses «Charades extérieures», Han Fei affirme que «L'altruisme excite la haine ; l'intérêt personnel assure l'harmonie. Animosité et conflits dressent parents et enfants les uns contre les autres, alors qu'il suffit de donner du bouillon gras à ses ouvriers pour être bien servi», comme le relève Jean Levi, nous ne sommes pas bien éloignés du célèbre passage d'Adam Smith sur la «bienveillance du boucher».

La Chine se développe, certes, mais peut-être pas au sens stricto sensu du développement vers plus de démocratie, comme on aime souvent se rassurer à le penser. Plutôt devons-nous la voir changer.

...à suivre...


Hyperliens
LeNouvelliste, Jean Romain, classiques chinois, confucianisme, taoïsme, légisme, Jean Levi

Référence bibliographique
Han-Fei-tse ou Le Tao du Prince. La stratégie de la domination absolue, Han Fei (présenté et traduit du chinois par Jean Levi), Points Sagesses Seuil, Paris, 1999

* Les spécialistes de la langue chinoise ne me tiendront pas rigueur d'utiliser généralement le système de transcription de l'Ecole français d'Extrême-Orient (E.F.E.O) lorsque j'indique des noms chinois. Il ne s'agit nullement de privilégier l'approche francophone au détriment de celle anglo-saxonne. Travaillant principalement sur la Chine ancienne, à l'instar de Jean Levi je considère que d'un point de vue esthétique et symbolique ce système répond mieux que le pinyin à la transcription des «noms anciens et vénérables dont la mémoire s'engloutit dans la poussière des tombeaux».

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Russie : haute couture militaire 2008

Dans mon billet précédent, j'écrivais que «l'Armée russe n'est plus l'Armée rouge». C'était vendre bien trop vite la peau de l'URSS...

La présentation à Vladimir Poutine en janvier 2008 de quelque 70 modèles d'uniformes prouve que de ce côté-là, l'Armée russe fait toujours dans la haute couture. Comme on le constatera dans ce diaporama, l'envergure des casquettes ne change pas et les parements sont toujours aussi étincelants.
Pas très adapté à des bourbiers du type de la Tchétchénie, certes, mais ça en jette.

Finalement, au vu des modèles féminins, je me dis qu'entre Vladimir Poutine, Anatoli Serdioukov (ministre de la Défense) et le célèbre couturier Valentin Yudashkin, il ne manquait que Sir Elton John pour mettre le défilé en musique.

Et voilà, suffisait de demander...


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Russie : effectifs de l'armée maintenus

27 mars 2008

C'est l'annonce faite ce jeudi 27 mars 2008 par le général Vassili Smirnov, chef-adjoint de l'Etat-major général des Forces armées russes. «Nous recherchons des moyens d'optimiser les organes de commandement, mais nous n'avons pas l'intention de réduire les effectifs des forces armées et de l'appareil central». Définis par décret présidentiel, les effectifs en question s'élèvent à 1'134'000 hommes pour les Forces armées et à 10'523 personnes pour l'appareil central. Le général Smirnov précise que ces chiffres seront respectés malgré la restructuration en cours de l'appareil militaire russe.


Restructuration ?

Depuis la fin des années 1980 - «la chute du mur de Berlin», les programmes de réforme des appareils militaires se succèdent dans de nombreux pays. Les axes de transformation entendent répondre aux enjeux sécuritaires à venir : la gestion des crises, le maintien de la paix ou le contre-terrorisme, voire la sauvegarde des conditions d'existence, sur une base nationale ou dans le cadre de dispositifs multinationaux. Objectif poursuivi par toutes ces restructurations : des armées aux dimensions nettement plus restreintes, mais dotées de professionnels capables d'engager des équipements de haute technologie et d'une capacité de mobilité très élevée.

L'Armée russe n'échappe pas à cette mouvance mais elle est à la peine. Elle demeure même l'une des institutions de l'Etat russe les plus réfractaires au changement. Pourtant, réformer l'appareil militaire pour le moderniser constituait un objectif prioritaire du second mandat de Vladimir Poutine. D'ailleurs, il affirmait encore le 23 février 2008, à l'occasion de la «Journée du défenseur de la patrie» que l'Armée russe restait «la garantie la plus importante aussi bien de la sécurité nationale que du développement positif [sic] de la Russie et représente, sur le plan global, un facteur notable de stabilité internationale». Mais, malgré les vitupérations de ses généraux et au-delà d'une augmentation de 20% des dépenses militaires prévue pour 2008 ainsi que de certaines prouesses technologiques réalisées sur différents systèmes d'armes, l'Armée russe n'est plus l'Armée rouge. Désorganisée par l'effondrement de l'URSS (1991), affaiblie par ses revers durant la première guerre de Tchétchénie (1994-1996), minée par le faible moral des conscrits, les sévices infligés aux jeunes recrues et la mauvaise condition sanitaire de celles-ci, ainsi que par la corruption du complexe militaro-industriel, la refonte de l'Armée russe en une armée dite moderne tient encore du mythe.


À tout le moins, tant le budget que les effectifs devraient suffire pour organiser un défilé du 9 mai digne de ce nom.

Hyperliens
9 mai, RIA Novosti

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Youri Gagarine disparaissait il y a 40 ans


Né le 9 mars 1934 à Klouchino, près de Gjatsk - ville renommée Gagarine en 1968, Youri Alekseïevitch Gagarine a marqué l'histoire de la conquête spatiale en devenant le 12 avril 1961 le premier homme à voyager dans l'espace.

Il s'envola ce jour-là du cosmodrome de Baïkonour (Kazakhstan) à 6 heures 07 GMT à bord du vaisseau spatial Vostok 3KA-2 (Vostok 1). Réalisant en 1 h 48 min la première révolution autour de la Terre à une altitude moyenne de 25o km, il effectua son retour sur le plancher des vaches suspendu à un parachute, après s'être éjecté de sa capsule à quelques kilomètres de la Terre.

Youri Gagarine a trouvé la mort lors d'un vol d'entraînement le 27 mars 1968. RIA Novosti met en ligne un diaporama à cette occasion.

Hyperliens
Youri Gagarine, cosmodrome de Baïkonour, Vostok 1, RIA Novosti

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USA2008 : À trois heures du matin ? Oups...

23 mars 2008

Pas de conclusion hâtive, allons-y pas à pas, histoire d'y voir clair.

Voici un clip approuvé par Hillary Clinton :


...là, celui approuvé par Barack Obama :



...et ici, ce qu'en dit la «petite fille» de 3 heures du mat' :


Bon, je réfléchis... Je réfléchis... J'ai beau réfléchir encore, je sèche ! Franchement, je ne saisis pas le but de la manoeuvre. Autant pour moi. Le mieux à faire, c'est d'attendre le décodage qu'en fera Lyonel Kaufmann blogue... Mes éparpillements sur la toile.

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US Air Force : des jets qui carburent au charbon

Une constante avec les Etats-Unis : ils ne cherchent pas à trouver le diable dans les détails lorsqu'il en va de leur sécurité nationale. Le dernier projet connu en date de l'US Air Force ne déroge pas à la règle.

Soucieuse de réduire sa dépendance au pétrole étranger, l'armée de l'air étasunienne imagine faire voler d'ici à 2016 la moitié de sa flotte de jets avec un carburant de synthèse tiré de la gazéificaton et de la liquéfaction du charbon domestique.

We're going to be burning fossil fuels for a long time, and there's three times as much coal in the ground as there are oil reserves. Guess what? We're going to burn coal.
William Anderson
Assistant du Serétaire d'Etat à l'US Air Force

Nonobstant les avis d'experts sur la menace environnementale représentée par le charbon et le coût astronomique que représente la production d'un tel carburant, l'US Air Force entend jouer le rôle de fer de lance pour le secteur privé. William Anderson se dit convaincu que les secteurs de l'aviation commerciale et des entreprises de camionnage suivront.
Ne voulant ni financer, construire ou exploiter l'unité de production du futur «carburant vert», l'US Air Force offre par contre aux promoteurs privés un site de quelque 283 hectares sur sa base de Malmstrom, dans le Montana, à proximité du fleuve Missouri. L'offre est assortie de la promesse que l'armée de l'air sera le plus gros consommateur gouvernemental de ce type de carburant. La rentrée des offres est fixée au mois de mai et, une fois un développeur retenu par l'US Air Force, la construction devrait s'étendre sur quatre ans. Les besoins annuels de l'Air Force s'élèveraient à quelque 400 millions de gallons. Pour y répondre, ce sont au moins sept unités de production qu'il faudra construire.

L'idée de produire du carburant à partir du charbon n'est pas nouvelle : les Allemands utilisaient le procédé lors de la Seconde Guerre mondiale et, aujourd'hui, la Chine place cette production en véritable enjeu stratégique et économique pour assurer sa croissance. D'énormes complexes industriels sont en construction dans le nord du pays - là où le charbon abonde, et l'ex-Empire du Milieu entend devenir le laboratoire mondial du charbon propre. Un détail qui a tout de même son importance : la liquéfaction du charbon nécessite de l'eau, et ces régions houillères en manque cruellement.

N'ayant a priori pas de souci du côté de l'approvisionnement en eau, l'US Air Force est catégorique sur la question de la menace environnementale relevée par divers experts : il n'y aura pas de doublement des émissions de gaz à effet de serre par rapport au pétrole (émissions liées à la production et celles inhérentes à la consommation). Selon l'armée de l'air, le progrès technologique permettra de capturer le dioxyde de carbone et autres émissions toxiques produites lors de la fabrication du futur «carburant vert».
L'argument invoqué n'est pas sans rappeller celui avancé lors de la sortie d'un certain emballage de chocolats...

Il est vrai que là on parle de sécurité nationale au sens militaire du terme, et non au sens large, ce qui impliquerait de prendre en compte un détail collatéral comme le changement climatique.

...à suivre...

Pour l'article original en anglais :
Air Force prod aids coal-to-fuel plans, By Matthew Brown (Associated Press Writer)

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Elisabeth Badinter et Diderot : l'art de se faire entendre

22 mars 2008

Dans un entretien accordé à Le Monde, Elisabeth Badinter parle de Diderot, en l'occurrence de la place que le philosophe, le chef de file de l'Encyclopédie, occupe dans sa démarche intellectuelle.

L'auteure de Condorcet : un intellectuel en politique, de L'Amour en plus : histoire de l'amour maternel, d'Emilie, Emilie : l'ambition féminine au XVIIIe siècle et d'XY, de l'identité masculine - pour ne citer que les ouvrages que j'ai lu - ainsi que du très discuté Fausse route : réflexions sur 30 années de féminisme, évoque à cette occasion la sympathie qu'elle porte «au matérialisme de Diderot et à sa morale si contemporaine».

...peut-être la philosophie est-elle morte sans que l'on s'en aperçoive !
Pour Elisabeth Badinter, depuis la chute du mur de Berlin, en l'absence d'une pensée philosophique forte, si tant est que la philosophie existe encore, nous assistons à un retour en force des religions au détriment de la raison.

Nous voulons ignorer que la soumission volontaire à l'irrationnel se transforme bien vite en une servitude insupportable.
Selon Elisabeth Badinter, «nous sommes en manque d'espérances» et, à défaut d'en avoir suffisamment conscience, nous courons droit à l'aliénation.

Les hommes des Lumières, et Diderot en particulier, se sont battus comme des lions pour éloigner l'homme et le citoyen de la tentation des chimères et le sortir des griffes des religieux. Mais la caste des croyants n'ayant jamais totalement renoncé à régir le monde et nos esprits, il suffirait de leur entrouvrir la porte pour qu'on ne puisse plus la refermer avant longtemps. Qui ne voit l'oppression des femmes musulmanes sous la charia ? Les pressions insidieuses qui menacent l'avortement ? L'autocensure permanente quand il s'agit des religions ? L'interdiction du blasphème sous peine de procès, ou pire, de fatwas ? Diderot a connu la prison de Vincennes pour s'être moqué des autorités, et toute sa vie il a craint d'y retourner. Mais cela ne l'a pas empêché de fourbir l'arme redoutable qu'est l'Encyclopédie contre les marchands d'illusions et de superstitions. Nous voilà contraints de reprendre ce combat que l'on croyait définitivement gagné. A défaut de posséder son génie intellectuel et sa verve inimitable, au moins ne le trahissons pas. Souvenons-nous des leçons de notre frère Diderot. Il y va de nos libertés.

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« C'était bien » : Pierre Clostermann

21 mars 2008

Le Grand Cirque est parti.
Le public a été satisfait. Le programme était assez chargé, les acteurs pas trop mauvais, et les lions ont dévoré le dompteur.
On en reparlera en famille quelques jours encore. Et même quand tout sera oublié - la fanfare, le feu d'artifice et les beaux uniformes - sur la place du village subsisteront encore l'auréole de sciure de la piste et les trous des piquets.

La pluie et l'oubli en effaceront vite les traces.

Pierre Clostermann
Extrait de Le Grand Cirque


Qu'est-ce que je l'ai lu, relu, re-relu de nouveau et à nouveau Le Grand Cirque. Mon troisième livre de grand - j'allais sur mes 10 ans. Après Les malheurs de Sophie de la Comtesse de Ségur et Le Capitaine Fracasse de Théophile Gautier, Le Grand Cirque de Pierre Clostermann a véritablement marqué mon entrée en lecture.

Ce samedi 22 mars, date anniversaire de la mort de Pierre Clostermann, vous savez quoi ? Si mon état grippal me le permet, je me lèverai une ou deux heures avant ma femme et mon fils. Pendant que l'eau du thé chauffera, j'irai à ma bibliothèque prendre Le Grand Cirque. Je jetterai un dernier coup d'oeil à la table dressée pour le petit-déjeuner. All clear ? Contact ! Bien calé dans un fauteuil du salon, de nouveau je verrai « Cloclo » manipuler les pompes à main et les boutons du démarreur. L'hélice commencera à tourner lentement et j'entendrai le moteur de son Spitfire démarrer dans un bruit de tonnerre. Alors, je sentirai son avion trembler comme une chaudière sous pression. Avec lui, mon coeur se mettra à battre plus vite, plus fort. J'avalerai une gorgée de mon thé et je me laisserai encore une fois emporter dans le tourbillon de son Grand Cirque.

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Horst Rippert : Si j'avais su, je n'aurais pas...

19 mars 2008

Cher Antoine de Saint-Exupéry,

On vous a qualifié d'aviateur distrait, au point de vous surnommer « Pique la Lune ». Mais de là à oublier de faire inscrire en belles lettres blanches sur le bleu azur des ailes de votre Lightning P-38, « C'est moi, St-Ex »...

Si, si, cela aurait évité au pilote allemand Horst Rippert de nous gratifier aujourd'hui d'une affirmation digne du film « La Guerre des boutons ». Allez, je le reconnais, je suis un peu dur avec lui. Non pas qu'il vous ait abattu - si tant est que ce soit bien lui : vous étiez en mission de guerre, lui aussi, là n'est pas la question. Mais tout de même : « Si j'avais su, je n'aurais pas tiré. Pas sur lui »...

Dans notre jeunesse, nous l’avions tous lu, on adorait ses bouquins. Il savait admirablement décrire le ciel, les pensées et les sentiments des pilotes. Son œuvre a suscité la vocation de nombre d’entre nous. J’aimais le personnage.
Entre-nous, cher Antoine de Saint-Exupéry, dans sa jeunesse, outre Courrier sud, Vol de nuit, voire Terre des hommes, Horst Rippert a dû lire avec la même passion Michel Strogoff de Jules Verne. Parce que vous l'imaginez, Horst Rippert, rentrer à sa base en déclarant « Herr Oberst, l'avion était un P-38 de reconnaissance, non armé. Je n'ai pas voulu l'abattre : il était piloté par St-Ex, écrivain ! » Fallait vraiment qu'il ait eu envie de découvrir la Russie...

Liens
- Pour la déclaration de Horst Rippert, 24 ans en 1944, pilote de la Luftwaffe, groupe de chasse Jgr.200
- Pour l'analyse de l'hypothèse qu'Horst Rippert a bien abattu l'avion d'Antoine de Saint-Exupéry : les fils de discussion du forum « Histoire de l'aviation » sur www.aerostories.org.

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Moostic : une plateforme de e-learning gratuite

7 mars 2008

David Touvet, Jean-Luc Thirot et François Jimenez, créateurs de moostic, une plateforme d'enseignement et d'apprentissage, ainsi que de gestion de groupes, passent en phase de promotion active de leur projet.

moostic ? C'est simplement Moodle gratuit, clé en mains.

Si de nombreuses universités et grandes écoles utilisent Moodle (David Touvet avance le chifre de 30% pour France et de la grande majorité en Suisse), moostic a de son côté déjà séduit plus de 1'600 utilisateurs et généré quelque 400 espaces de groupes ou d'associations.

Pour ma part, je n'ai pas encore pris le temps de tester cette plateforme. Mais si l'école de mon fils venait à adopter moostic pour partager avec les parents les méthodes dites modernes d'enseignement de la grammaire (voir mon billet précédent), je me laisserai volontiers piquer par la bête.

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La grammaire est une chanson douce


Vous voyez, les mots, c'est comme les notes. Il ne suffit pas de les accumuler. Sans règles, pas d'harmonie. Pas de musique. Rien que des bruits. La musique a besoin de solfège, comme la parole a besoin de grammaire.
Erik Orsenna
Extrait de La Grammaire est une chanson douce




– Qui êtes-vous ? je veux dire : qui êtes-vous, les Subjonctifs ? Des malades ? Des dangereux ? Ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi le dictateur Nécrole vous déteste tant, pourquoi il veut lancer l’assaut contre vous.
– Je te l’ai expliqué : le subjonctif est l’univers du possible.
Erik Orsenna
Extrait de Les Chevaliers du Subjonctif




Depuis quelque temps, les accents grognaient. Ils se sentaient mal aimés, dédaignés, méprisés. À l’école, les enfants ne les utilisaient presque plus. Les professeurs ne comptaient plus de fautes quand, dans les copies, ils étaient oubliés. Chaque fois que j’en croisais un dans la rue, un aigu, un grave, un circonflexe, il me menaçait.
Erik Orsenna
Extrait de La révolte des accents




La phrase la plus dépouillée se compose d'un sujet, d'un verbe et d'un complément. Chaque mot se définit par une question qu'on pose après le verbe : qui est-ce qui ? ou qu'est-ce qui ? pour le sujet, qui ? ou quoi ? pour le complément.

Patrick Rambaud
Extrait de La grammaire en s'amusant


Ces livres auraient-ils écrits pour rien ? Depuis que mon fils revient de l'école avec des phrases à colorier par tronçons, « lequel en jaune, en rouge, en gris ou en vert, dit papa ? », le doute m'envahit. Apprentissage de la gamme ou d'une technique de mise en couleur ?

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EURO 2008 : le football illumine la Suisse (1)

5 mars 2008

Mercredi 4 mars 2008, 05h50, Pully, place de la Poste, ...ou « station de Pully-Village » si vous consultez un plan de la ville. Mes flux ATOM/RSS préférés sommeillant encore avec mon Mac dans ma mallette de transport, je prends le « Matin Bleu » et le « 20 minutes » pour faire ma revue de presse dans le train. Je sais, « revue de presse » c'est un peu fort, mais je fais avec ce que je trouve à ces heures indues. Notez bien que « 20 minutes » se la joue aussi un peu. Mon trajet en train dure exactement 20 minutes. J'arrive à lire ces deux canards, plus résoudre la grille de mots croisés du « Matin Bleu ». C'est dire la consistance de l'information. Bref, on n'est pas là pour tirer sur l'ambulance. Et on ne va pas non plus ouvrir ici le débat sur les gratuits qui « redonnent le goût de la lecture aux jeunes » ou qui surajoutent à la montagne de déchets produits chaque jour. Allez, quand même...

Concernant le recyclage du papier : une fois vos deux gratuits lus, ne les jetez pas au sol, ne les laissez pas traîner par pur altruisme sur les banquettes de train ou de bus. Même, ne les ramenez pas dans les nouvelles caissettes de récupération ...si vous en trouvez une. Non, il y a mieux à faire. Ramenez-les en cuisine, pour vos fruits et légumes. Vous verrez, Paris Hilton au milieu des épluchures de pommes ou Britney Spears parmi les oignons, ça le fait. Voilà pour la minute écologique du père François.

Or donc, 05h51, mes deux gratuits sous le bras, je m'en vais rejoindre le quai n° 2. Il fait froid ce matin. Il a neigé durant la nuit et les toits alentours sont blancs. Mon train arrive en gare dans 10 minutes. Il souffle un petit vent glacial. Je décide d'attendre en m'abritant le long de la façade de la succursale de l'UBS. « Le football illumine la Suisse ». C'est là, écrit en blanc, sur fond rouge, barrant les deux baies vitrées qui composent une des façades de la succursale. Les gratuits m'en tombent. Ils ne savaient pas qu'on pouvait faire pire qu'eux. Moi non plus d'ailleurs. Le foot - entendez l'Euro 2008 - illuminant quoi que ce soit, vraiment, faut oser l'image. J'ai beau essayer, je ne la vois pas cette idée de ballon rond qui baignerait la Suisse d'une lumière bienfaisante. Il m'annonce quoi, là, Monsieur UBS ? Que l'Euro 2008 constitue une sorte de NDE (Near Death Experience) ? Que nous cheminons actuellement le long d'un tunnel et que dans 93 jours nous allons entrer dans une lumière intense et rencontrer des « êtres de lumière » ?

Mes gratuits à nouveau en main, je me dirige vers le passage sous voies. L'idée de la lumière dégagée par 22 guerriers - pardon : joueurs - sur un terrain, encouragés par 10 ou 12'000 supporters en transe - dont un bon tiers plus à cause des effets de la bière que du spectacle, le tout entouré et chapauté par un dispositif de sécurité propre ranger le Réduit national sur l'étagère des passoires, manque de me faire rater une marche. Intuition - ou illumination, vous avez le choix - au moment où je prends pied sur le quai n°2. Il doit s'agir d'une traduction inadéquate de l'allemand vers le français. En allemand, l'idée était certainement de dire que l'Euro 2008 « mettait la Suisse en lumière ». Je vérifierai à Berne, un de ces quatre.

06h03, mon train démarre. Installé dans mon siège, j'ouvre le « 20 minutes ». À La deux, je vous le donne en mille : « Le tourisme dopé par le franc faible et l'Euro 2008 ». Une image de six supporter hollandais - dont quatre vous saluent une bière à la main - avec pour légende : « Suisse Tourisme espère que les fans de foot « joueront les prolongations » quelques jours ». Allez, hop, Sudoku, ce matin...

Là, je sens que ce billet est le premier d'une série. J'évoquerai prochainement des histoires de sponsors, de soif et de gratuité de l'eau. C'est lumineux. C'était dans le « Matin Bleu » de lundi.

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Ode à Hillary

4 mars 2008

Cette vidéo de 16 minutes réalisée par deux étudiants vaut son pesant [...allez, j'ose, par référence à Jimmy Carter] ...de cacahuètes.


Pour toute analyse ou décodage des images ainsi que de la campagne « USA2008 », je vous renvoie sans hésiter sur l'excellent Lyonel Kaufmann blogue... Mes éparpillements sur la toile.

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« C'était bien » : Marguerite Duras

3 mars 2008

« On croit que, lorsqu'une chose finit, une autre recommence tout de suite. Non. Entre les deux, c'est la pagaille. »

Marguerite Duras
Extrait d'Hiroshima mon amour


Une reprise du titre d'un ouvrage de Jean d'Ormesson paru en 2003 aux Editions Gallimard, en appel de ce type de billets. « C'était bien » ...ce qu'ils·elles ont écrit, peint, filmé, chanté, joué, etc., et ils·elles nous manquent.

Ce lundi 3 mars marque le 12e anniversaire de la mort de Marguerite Duras.
Née à Gia-Dinh, Vietnam, le 04 avril 1914 et décédée à Paris le 3 mars 1996, Marguerite Donnadieu dite Duras restera pour beaucoup l'auteur de L'Amant, roman autobiographique publié en 1984 par Les Editions de Minuit, et qui, outre l'obtention du Prix Goncourt en 1984, sera adapté au cinéma par Jean-Jacques Annaud en 1992 sous le titre de L'Amant, avec Jane March dans le rôle de la jeune fille et Tony Leung Ka Fai dans celui du Chinois.

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Liberez Fouad Mourtada

1 mars 2008

Pour éviter toute redite, je vous redirige simplement sur politis.ch, le site de Lyonel Kaufmann - socialiste boéland.

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